Les Champs de la Lune (Catherine Dufour)

Catherine Dufour est une personnalité que j’apprécie et que je prends plaisir à écouter régulièrement dans des émissions de radio ou dans des épisodes de podcasts pour parler de science-fiction ou d’informatique. Je connais finalement moins l’autrice, même si j’avais lu et beaucoup aimé son roman Le goût de l’immortalité. Il faudra que je rattrape un jour mon retard sur ses publications mais en attendant j’ai eu envie de lire son dernier roman, Les Champs de la Lune, qui vient tout juste de sortir dans la collection Ailleurs & Demain chez Robert Laffont.

Puisqu'il faut trouver une autre planète habitable, pourquoi pas la Lune ? Mais la vie est rude sous le feu blanc du Soleil. À l'abri de son dôme agricole près du cratère Lalande, une fermière regarde les moissons et les générations s'élever et retomber comme les marées terrestres.

Le soir, au clair de la Terre, elle parle avec son chat des fièvres qui frappent les humains, des fissures qui menacent la survie de la ferme, des enfants saisis par l'appel du vide, des robots fous et des fleurs dans la mer de la Tranquillité.

Son quotidien bascule le jour où on lui confie le soin d'une petite fille a la main verte. Qui fera éclore l'autre ?

Nous suivons le quotidien à la surface de la Lune d’El-Jarline, une agricultrice qui s’occupe d’une ferme qui doit nourrir la cité voisine souterraine, ou plutôt soulunaire. Le récit prend la forme des rapports qu’elle adresse à l’institution bureautique pour laquelle elle travaille. Le ton est ironique, un peu désabusé, et le rendu est plutôt drôle.

Ses alertes de sécurité sur la fissure du dôme ou sur une plante invasive sont ignorées, et on pense à ces scientifiques qui ont alerté sur le changement climatique sans être véritablement entendus. Se sachant non lue, El-Jarline se permet de plus en plus de remarques sarcastiques, et cela devient franchement hilarant.

La narratrice nous fait voyager avec elle sur la Lune colonisée, nous découvrons avec elles ses paysages naturels et ses constructions humaines. À travers ses voyages et ses rencontres, El-Jarline fait part de ses observations et son regard étonné et mi-moqueur fait penser aux Lettres persanes de Montesquieu, comme je l’ai entendu dans une émission de radio où était évoqué le roman de Catherine Dufour. A travers elle, nous observons la façon dont les humains vivent sur la Lune et comment la société lunaire s’organise. Les conditions à la surface sont dangereuses, la vie peut être cruelle, mais l’autrice montre comment cette cruauté n’est pas sans poésie.

Le rythme du récit peut sembler lent mais je préfère le qualifier d’immersif, on suit le quotidien de la narratrice et on se laisse emporter par les descriptions des paysages lunaires et de ses habitants, humains et non-humains. Il y a un fil rouge autour de la fièvre aspic, une maladie qui décime la population lunaire et sur laquelle la narratrice va enquêter.

L’humour est très présent mais il y aussi des émotions plus tristes, quand la narratrice découvre le deuil. El-Jarline s’éveille progressivement à des émotions qu’elle découvre, et c’est assez touchant.

Globalement, il s’agit d’un très beau roman de science-fiction, inventif et poétique. Après cette lecture, je suis encore plus décidé à rattraper mon retard dans les oeuvres de Catherine Dufour.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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