Terra Humanis (Fabien Cerutti)

Terra Humanis est un roman de science-fiction de Fabien Cerutti, publié en juin 2023 aux Editions Mémos. Le résumé nous promet un récit entre fiction climatique et utopie écologique :

Dans un futur proche, une femme entourée d’un groupe d’amis fidèles s’engage à mettre en œuvre les changements nécessaires qui sauveront le XXIe siècle.

Par son destin hors du commun, parviendra-t-elle à conduire l’humanité vers une voie heureuse, loin des années dystopiques qui s’annoncent ?

Le roman est construit avec de courts chapitres où on passe d'une période à une autre, avec des allers-retours entre les décennies du XXIe siècle. Ce n'est pas désagréable et cela se lit bien car c'est construit intelligemment, on est souvent dépaysés mais jamais totalement perdus.

Je dois dire que j’étais assez partagé au moment de refermer ce roman. Le début et le coeur du roman, disons les trois premiers quarts, m’ont semblé d’une naïveté confondante. Tout le récit repose sur un petit groupe de personnes, évidemment bien éduquées ; car heureusement le petit peuple, ignare et dangereux, est guidé par des personnes bien nées, dont le couple formé par Rebecca et Luc que nous suivrons tout au long du roman.

J’ai eu du mal à croire aux succès de ce groupe qui souhaite combattre le réchauffement climatique avec des moyens d’envergure. Je pense que le coeur de mon problème avec ce roman est dans la vision de l’écologie qu’il véhicule : « apolitique » et incapable de lutter à la racine du problème, c’est-à-dire le modèle capitaliste. On se retrouve avec une ribambelle de bonnes intentions qui, à mon sens, ne sont pas crédibles et passent complètement à côté des enjeux. Passons rapidement sur l’opposition grossière entre les gentils écologistes conciliants avec le capitalisme et les méchants éco-terroristes violents et radicaux …

Tout est résumé dans ce passage :

Le propos sera de condamner avec la plus grande fermeté la brutalité mais aussi de montrer que les motivations des débordements sont compréhensibles. Et que ce type d'événements risque de se répéter. Il est capital de dédouaner Terra Humanis de toute responsabilité dans cette révolte. La colère n'excuse jamais la violence.

On reconnaît ici l'idéologie dominante, par la voix de nantis qui condamnent la violence tout en passant sous silence la violence sociale qu'ils n'ont jamais connue. J’ai parlé de naïveté tout à l’heure, mais je devrais plutôt parler d’aveuglement coupable.

J’ai conscience que l’avis que je donne ici sur ce roman se base avant tout sur mes propres opinions politiques, mais je pense que les fictions ont une responsabilité d’éveil et d’émancipation. Je comprends qu’un auteur de science-fiction puisse se reconnaître dans l’écologie gentillette à la sauce Jean-Marc Jancovici et Hugo Clément (qui sont d’ailleurs cités dans la bibliographie) mais j’ai du mal à me passionner pour une fiction qui véhicule cette idéologie.

Je dois tout de même avouer que le dernier quart m'a semblé bien meilleur, avec un rebondissement dont je vais éviter d'en dire trop pour vous laisser la surprise. Il conclut en tout cas de façon plus intéressante un roman qui m’aura globalement déçu.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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