Zéro Janvier

Chroniques d'un terrien en détresse – Le blog personnel de Zéro Janvier

Cette collection “Black Dawn” est décidément très prometteuse. Après Grievers d’Adrienne Maree Brown qui m'avait déjà beaucoup plu, je crois que le deuxième roman de cette collection m'a encore plus séduit.

Margaret Killjoy nous plonge dans un univers de fantasy inspirée de notre XVIIIe ou de notre XIXe siècle pour nous parler de notre monde. Le protagoniste est un journaliste embarqué au sein de l'armée impériale dans une guerre de conquête coloniale. Sa mission est de suivre le général en chef de cette armée et de livrer à l'opinion publique la propagande attendue par l'Empire.

Evidemment, rien ne va se passer comme prévu et nous allons suivre notre journaliste à la découverte de la population indigène. Loin des sauvages et des barbares décrits par la propagande – celle qu'il était chargé d'écrire – il découvre une société basée sur la liberté, l'autonomie, la solidarité, et l'aide mutuelle. Il découvre une utopie anarchiste, en tout cas telle que l'autrice l'imagine.

Ce roman est peut-être l'oeuvre de fantasy la plus politique que j'ai lue, la preuve qu'un univers fictif ne peut être qu'un moyen idéal pour parler de notre société. Ce récit est également l'un des meilleurs romans de fantasy que j'ai lus. Une oeuvre remarquable pour présenter l'idéal anarchiste et le rôle de la fiction pour imaginer des utopies. Les imaginer, pour ne pas seulement les rêver, mais commencer à les construire.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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Je publie ici en une seule fois mes critiques des deux romans du diptyque d’Estelle Faye.

Les Seigneurs de Bohen (Estelle Faye)

J'ai pris une grosse claque avec ce roman. J'en avais entendu beaucoup de bien mais je crois que c'est encore meilleur que ce à quoi je m'attendais.

J'ai d'abord été emporté par l'écriture, évocatrice et immersive. J'ai ensuite été séduit par les personnages, profonds et attachants dans leurs styles pourtant tous différents. J'ai enfin été emballé par le récit lui-même, à la fois épique et profondément humain.

L'univers imaginé par Estelle Faye est décrit avec finesse, sans détails inutiles mais avec ce qu'il faut de petites touches pour qu'on y croit et qu'on y plonge avec plaisir.

C'est de la très bonne fantasy, de la très grande fantasy. Et dire que ce n'est que le premier tome d'un diptyque ! Si le second est aussi réussi que celui-ci, me voilà reparti pour quelques journées de lecture passionnante.

Les Révoltés de Bohen (Estelle Faye)

J'avais été totalement enchanté et emballé par Les Seigneurs de Bohen, le premier tome de ce diptyque. Je l'ai été un tout petit moins par le second, mais cela reste de l'excellente fantasy.

Commençons par les bémols : ce deuxième volume est plus long que le premier et m'a parfois semblé trop long ; on y suit une multitude de personnages, presque trop parfois, ce qui entraine une certaine confusion et une lassitude à certains moments de la lecture ; je dirais même que certains fils narratifs m'ont semblé assez dispensables.

Je vous rassure, ces bémols sont faibles face aux immenses qualités de ce roman et à l'écriture toujours aussi évocatrice et immersive d'Estelle Faye. On retrouve avec plaisir certains personnages que l'on avait accompagné dans le premier tome. L'intrigue est complexe, longue, mais s'achève dans un final épique digne des plus grandes sagas de fantasy. Le tout avec une atmosphère empreinte de nostalgie, face au temps qui passe et aux espoirs déçus : les héros ont vieilli, leurs rêves de jeunesse sont derrière eux, la réalité a repris ses droits après la révolution.

Je suis ravi d'avoir pris le temps de lire ces deux magnifiques romans d'Estelle Faye. Si ce second tome n'égale pas tout à fait l'excellence du premier, l'ensemble constitue une très grande oeuvre romanesque, digne de figurer au panthéon de la fantasy et de la littérature de l'imaginaire francophone.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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Je sors un peu déçu de la lecture du second tome du diptyque “Siècle Bleu” de Jean-Pierre Goux.

Bien sûr, on y retrouve le rythme haletant du premier tome et certains personnages que l'on avait appris à apprécier dans le premier volume. Le récit s'accélère, les complots se dévoilent, le suspense est continu tout au long du livre.

Malgré tout, j'ai trouvé que l'auteur en faisait parfois trop.

Trop didactique quand il profite d'un dialogue ou d'une description pour expliquer en détail certaines connaissances qu'il estime, parfois à tort, que le lecteur doit comprendre.

Trop dans le récit lui-même, quand les coïncidences, ou les synchronicités comme il les appelle dès l'introduction, font que quasiment tous les personnages sont liés les uns aux autres d'une façon ou d'une autre.

Trop idéaliste, quand il imagine une révolution écologiste qui ne remettrait en cause que les abus du capitalisme (les méchantes corporations voraces) sans admettre que le capitalisme porte en lui, avec sa mécanique de croissante continue, les germes de l'écocide.

Je sors donc un peu déçu de cette lecture. J'ai bien aimé ce livre, j'ai pris du plaisir à le lire, mais j'ai trouvé que son côté naïf et parfois mystique le faisaient finalement passer un peu côté du sujet. Evidemment, ce n'est qu'un point de vue personnel, je me doute bien que l'auteur a abordé le sujet exactement comme il le souhaitait, mais son point de vue ne m'a en tout cas pas totalement convaincu.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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L'éditeur présente ce premier tome d'un diptyque comme un “thriller écologique” et cela résume bien le ton et le thème de ce texte. On peut aussi le ranger tout simplement dans le genre de la science-fiction et de l'anticipation.

L'auteur imagine un futur très proche où la course à la Lune a repris, cette fois entre les USA et la Chine. Un équipage américain s'apprête à décoller vers la Lune ; parmi eux, Paul Gardner est un jeune civil trentenaire sélectionné lors d'une émission de télévision qui en fait une star adulée de tous. En parallèle, Abel, un chercheur qui prend très à coeur la cause environnementale, décide de fonder secrètement une organisation écologiste aux méthodes radicales. Je ne vais pas vous en dire beaucoup plus pour ne pas vous gâcher le plaisir de la lecture, mais sachez que le roman parle de conquête spatiale, de complots politico-économiques, et bien sûr d'écologie.

Le rythme est parfaitement géré, on est clairement sur un page-turner efficace. Les personnages manquent peut-être un peu de profondeur mais on peut tout de même s'attacher à certains d'entre eux. J'ai été moins sensible aux parties concernant le chamanisme mais cela reste léger et cela ne m'a absolument pas empêché d'apprécier cette lecture.

Le roman s'achève sur un cliffhanger qui m'appelle évidemment à enchaîner directement avec la lecture du second tome, dont je vous parlerai donc prochainement.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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Je ne sais plus exactement où j’ai entendu parler de ce roman, mais il était présenté comme le digne représentant d’une fantasy française renouvelée et de grande qualité. Je me suis laissé tenter et je ne le regrette pas : ce livre est exactement tel qu’il m’a été présenté.

Camille Leboulanger nous propose une ré-interprétation d’un mythe en nous racontant la vie et les aventures de Cuchulainn, un héros légendaire celtique. Je dois avouer que même si son nom me disait vaguement quelque chose, je ne savais rien de lui avant de lire ce roman, j’ai donc découvert ce héros comme un novice à travers ce roman.

L’auteur enchaine les épisodes majeurs de la vie du héros : les circonstances de sa naissance, son enfance, l’événement qui le vaudra le surnom de Chien du forgeron, sa place à part à la cour royale de oncle, jusqu’à sa mort.

Le récit lui-même est bien mené et intéressant, mais ce n’est pas forcément l’essentiel ici, ni ce qui fait de ce roman un grand livre de fantasy. Là où l’auteur est fort, c’est sur deux aspects :

D’une part, il propose une ré-interprétation du mythe sur le thème de la virilité, avec un héros qui en représente tous les excès, tous les abus, toute la force d’une domination violente et injuste.

D’une part, il montre comment nait et se perpétue un mythe, comment les récits mettent en avant certains éléments et en occultent d’autres. Dans ce récit, le narrateur est fondamental : il est à la fois « notre » narrateur, celui qui prend la parole à travers le livre, mais aussi le narrateur interne de son public dans le livre. C’est un narrateur et un conteur, qui relate les aventures du Chien à la fois pour son audience et pour nous. Il interpelle le public, il commente le récit, il explique comment il a obtenu certaines informations, il justifie pourquoi il parle de tel aspect et laisse une part d’ombre sur telle autre.

Ce roman nous permet ainsi d’assister à la fois au récit des aventures de Cuchulainn et à la construction d’un mythe, celui du Chien du forgeron, tout en nous interrogeant sur la virilité et sa place dans nos imaginaires. C’est très bien fait et cela place ce livre très haut dans les oeuvres récentes de fantasy française. Cela m’a clairement donné envie de découvrir d’autres oeuvres de Camille Leboulanger. Ne soyez donc pas étonnés si je vous reparle prochainement d’autres romans de cet auteur.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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Benoît Coquard est sociologue, son terrain d'analyse est constitué des campagnes en déclin, en particulier les cantons ruraux de la région Grand Est, dont il est lui-même originaire.

Dans ce livre qui poursuit les travaux de sa thèse de doctorat, il nous propose de plonger dans le quotidien de jeunes vingtenaires et trentenaires vivant dans ces campagnes en déclin. C'est un travail au long cours de sociologue, voire d'ethnographe.

Le titre du livre montre, en creux, l'opposition entre ceux qui restent vivre et travailler dans ces cantons ruraux et ceux qui partent, pour étudier puis travailler, vers la grande ville la plus proche ou plus loin encore. L'auteur fait partie de cette seconde catégorie, tout comme moi, c'est l'une des raisons ce qui m'a attiré vers ce livre.

L'auteur montre parfaitement l'articulation entre le déclin économique de ces campagnes et la sociabilité qui s'y exprime autour de “clans”, de “bandes de potes” au sens desquelles la solidarité est forte mais s'arrête aux frontières du clan. La concurrence pour les rares emplois stables alimente non pas un repli sur soi, souvent décrit à tort dans les médias, mais un repli sur un clan solidaire en son sein mais en rivalité avec le reste du village, du canton, et du monde. La réputation est également une “monnaie” essentielle dans ce cadre social, puisqu'elle permet d'accéder à des emplois où la recommandation (ou le piston) est indispensable.

Politiquement, ce mode de vie et de pensée se traduit par une forte abstention ou par un vote qui tend très fortement à droite et à l'extrême-droite. L'enquête de Benoît Coquart s'est déroulée pendant de longues années et s'est achevée au moment où le mouvement des Gilets Jaunes commençait à éclore. Il a pu en observer les prémisses mais surtout en comprendre les ressorts dans ce cadre social d'habitude très rétif aux grands mouvements collectifs.

J'ai beaucoup aimé ce livre qui m'a plongé dans un milieu que je connais très mal ou que je ne connais plus vraiment. Je fais partie de ceux qui sont partis, je ne le regrette pas, mais après cette lecture je comprendrai sans doute mieux ceux qui sont restés.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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La saga de Clément Bouhélier dans son univers d’Olangar s’achève avec ce troisième roman de près de 600 pages.

Le décor reste le même mais l’ambiance a quelque chose changé suite aux événements qui se déroulaient à la fin du précédent volume. La cité d’Olangar est occupée, un régime collaborationniste pourchasse et torture ses opposants, et la résistance a bien du mal à survivre. Le seul espoir pourrait venir du Sud, où le chancelier est parvenu à s’exiler avec l’armée royale.

On retrouve, probablement pour la dernière fois, les personnages que l’on a pris plaisir à suivre dans les premiers romans. L’aristocrate humaine Evyna d’Enguerrand et l’elfe banni Torgend Aersellson s’organisent dans le Sud pour venir en aide à la cité d’Olangar, où le nain Baldek Istömin tente de maintenir organisée la Résistance tiraillée entre l’espoir d’une aide extérieure et la soif d’en découdre avec l’oppresseur.

Le récit est rythmé, bien mené et, hormis quelques rares baisses de rythme au milieu du roman, m’a globalement captivé du début à la fin. L’ambiance est d’abord lourde, oppressante, avant que l’action ne s’emballe au point de basculer quasiment dans un récit épique.

La conclusion, que je révélerai évidemment pas ici, est douce-amère et m’a totalement séduit. C’est une très jolie façon de quitter les personnages que l’on a aimé suivre tout au long de la saga. On sent bien l’émotion de l’auteur à leur dire au revoir, et c’est contagieux pour le lecteur.

Je garderai un excellent souvenir de cette saga, à la fois pour l’intérêt et l’originalité de son univers, pour les thématiques sociales et politiques abordées, pour la fine construction des récits de chaque roman et de la trame d’ensemble, et pour la qualité de ses personnages. C’est vraiment de la très bonne fantasy, un parfait exemple de que peut offrir de mieux ce genre souvent décrié.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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Après les deux volumes qui formaient un long et très bon roman sous le titre de “Bans et Barricades”, Clément Bouhélier nous propose de poursuivre les aventures de ses personnages dans son univers d'Olangar avec ce roman de près de 700 pages.

Le décor reste le même, avec cette fantasy en apparence très classique, avec ses humains, ses nains, ses elfes et ses orcs, mais en réalité fortement inspirée par notre XIXe siècle et son lot de révolutions industrielles, politiques et sociales. J'avais beaucoup aimé ce décor dans le premier roman en deux volumes, je l'ai donc retrouve avec grand plaisir ici.

Le récit est peut-être un peu lent à se lancer, le temps de mettre en place l'intrigue et de replacer les personnages principaux dans leur nouveau cadre, cinq ans après les événements du premier roman. Ensuite, cela s'enchaine vite et bien, avec un récit haletant, plein de scènes d'action spectaculaires, sans oublier d'explorer la psychologie des personnages. C'est efficace et plutôt prenant.

Dans l'ensemble, je dirais que c'est peut-être un cran en-dessous des deux premiers volumes, dont j'avais apprécié l'aspect très politique, mais que cela reste de l'excellente fantasy, qui sait jouer sur les clichés pour nous surprendre avec un récit captivant et bien écrit.

Le troisième roman, inévitable compte-tenu de la fin de celui-ci, m'attend déjà, je vous en parlerai sans doute très prochainement.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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J'avais entendu beaucoup de bien d'Olangar dans un podcast que j'écoutais récemment, je m'étais renseigné et je dois dire que le résumé m'avait alléché. Je n'ai pas été déçu : Clément Bouhélier propose de la fantasy comme je l'aime, avec des thématiques sociales et politiques.

Pourtant, le tout début rassemble tous les clichés de la fantasy, avec des nains ouvriers et le récit d'une grande bataille entre l'alliance des humains et des elfes face aux envahisseurs orcs. Heureuseument, après avoir installé ces clichés, l'auteur s'en éloigne habilement en révélant progressivement le cadre de son récit : un univers de fantasy qui semble classique, avec des nains, des elfes et des orcs, mais un univers de fantasy inspiré de notre XIXe siècle.

On y retrouve des marqueurs du contexte industriel, social et politique de ce siècle fondateur de notre histoire contemporaire : une monarchie constitutionnelle instaurée après une révolution, une bourgeoisie qui conteste de plus en plus le pouvoir de l'aristocratie, l'essor des grandes compagnies privées, la naissance des partis politiques en tant que forces électorales, l'éveil de la classe ouvrière et le rôle des syndicats dans les luttes populaires. Tout cela ne pouvait que plaire à l'amateur du XIXe siècle que je suis.

Autour de ce décor que j'ai beaucoup apprécié, le récit est plaisant et rythmé. Nous suivons principalement trois personnages : une jeune noble humaine qui vient à la capitale pour enquêter sur la mort de son frère, un soldat tué dans ces circonstances troubles ; un elfe, vétéran de la grande guerre contre les orcs, banni par son peuple pour des raisons qui restent mystérieuses pour le lecteur ; un nain, leader syndical aux chantiers navals, qui s'intéresse de près aux agissements troubles de la compagnie qui emploie ses camarades. Autour de ce trio gravitent quelques personnages secondaires que l'auteur nous propose de suivre dans quelques chapitres plus rares.

J'ai beaucoup aimé ce roman, même s'il ne constitue finalement que la moitié d'un roman complet. Si le récit s'achève sur de grandes scènes spectaculaires, il n'offre pas vraiment de conclusion aux enjeux ouverts au début du roman, et on sent bien que le roman a été découpé en deux livres qui ne peuvent pas se lire indépendamment. Je vais donc poursuivre ma lecture avec le second volume, en espérant qu'il soit aussi passionnant que celui-ci.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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Jay Castelletti nous propose un premier roman très plaisant à lire.

Nous sommes au tout début des années 1990 et nous suivons Dillon, quinze ans au début du récit, qui fuit sa famille très religieuse qui n'accepte pas son attirance pour les garçons. Il débarque à Sydney et commence à se prostituer pour payer son loyer. Au même moment, un serial-killer commence à s'attaquer aux prostitués gays du quartier.

Les personnages sont globalement attachants, le récit est intéressant, même si j'ai regretté le suspense un peu systématique à la fin de presque chaque chapitre. Bien sûr, cela donne envie de lire la suite, mais j'ai trouvé cela un peu artificiel. Un page-turner devrait à mon avis s'appuyer sur le récit lui-même, pas sur des rebondissements, des surprises ou des cliffhangers à la fin de chaque chapitre.

Malgré tout, j'ai bien aimé ce premier roman, dont l'auteur admet lui-même qu'il s'inspire en partie de sa propre expérience dans les années 1990.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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