Zéro Janvier

Chroniques d'un terrien en détresse – Le blog personnel de Zéro Janvier

Je lis tous les romans de Philippe Besson depuis la publication du premier, En l’absence des hommes, en 2001. Certains font partie de mes romans préférés en littérature française, d’autres m’ont laissé un goût plus mitigé, en particulier depuis quelques années. Sa proximité affichée avec Emmanuel et Brigitte Macron m’a probablement refroidi sur l’auteur, dont j’ai parfois dit que j’aimais les livres mais pas la personnalité.

Je continue toutefois à lire ses romans à chaque sortie, et c’est ce que j’ai encore fait avec Vous parler de mon fils, publié aujourd’hui chez Julliard, et que j’ai lu entre ce matin et ce soir.

Je vous demande de vous mettre à notre place. Un instant. Rien qu'un instant. Votre enfant vient vous raconter l'humiliation, la persécution, le bannissement. C'est votre fils, votre fille, il a douze ans, elle en a huit ou quatorze. C'est la chair de votre chair, ce que vous avez de plus précieux au monde. C'est l'être que vous devez protéger, défendre, soutenir, aider à grandir. Et il vient vous avouer cela. Vous y êtes ? Vous la devinez, votre stupéfaction ? votre culpabilité ? votre douleur ? votre colère ? Ça vous envahit, pas vrai ? ça vous submerge, ça vous dépasse, ça vous anéantit. Et ça, ce n'est que le début. Que les toutes premières minutes.

Cette fois, Philippe Besson s’attaque au thème du harcèlement scolaire, avec une pointe d’homophobie, et du suicide chez les adolescents. On pense bien sûr à Lucas, ce jeune adolescent de 13 ans qui s’était donné la mort en 2023 après avoir subi du harcèlement homophobe au collège ; le livre lui est d’ailleurs discrètement dédié.

Lorsque j’ai découvert la quatrième de couverture, j’ai été un peu inquiet. J’avais peur que le choix du sujet soit un peu opportuniste et le contenu un peu convenu. C’est parfois le travers des romans les moins personnels de Philippe Besson, quand il se saisit d’un sujet de société « dans l’air du temps », comme il l’avait fait maladroitement à mon avis en 2023 avec les violences conjugales et le féminicide dans Ceci n'est pas un fait divers, un livre correct mais qui manquait d’âme.

Cette fois, il y a de l'émotion, même si je n'arrive pas à savoir quelle part revient au sujet, à ma sensibilité à l’égard de cette histoire, et à l'auteur lui même par son écriture. Ce qui est sûr, c’est que la frontière est fine entre l’émotion et le mélodrame ; à chaud, je n’arrive pas à déterminer si Philippe Besson reste toujours du bon côté au fil du texte.

Malgré ces réserves qui ne sont peut-être que des a priori négatifs de ma part, j’ai été touché par ce roman. Comme toujours avec Philippe Besson, le texte est court et fluide, les phrases et les chapitres s’enchainent facilement, et on se surprend parfois à être saisi au vif par une phrase qui vise juste au milieu d’un paragraphe qui peut sembler banal. En tout cas, pour moi, cela a fonctionné. Ce n’est peut-être pas son meilleur roman, mais c’est tout de même une réussite.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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J’avais prévu de terminer l’année 2024 avec un tout autre livre, mais Cosmogonies, la préhistoire des mythes de Julien d’Huy m’a tellement plu que j’ai finalement eu envie de poursuivre avec le second ouvrage publié par cet auteur, toujours chez La Découverte, en septembre 2023 : L’aube des mythes, sous-titré Quand les premiers Sapiens parlaient de l'Au-delà.

On sait bien peu de choses sur la façon dont nos ancêtres préhistoriques concevaient la mort. Le faible nombre de sépultures paléolithiques attestées, la difficulté à interpréter les vestiges exhumés ou à attribuer l'enterrement et le traitement réservé aux corps à des rituels funéraires ne permettent guère d'en inférer des représentations.

Pourtant, les humains qui nous ont précédés devaient avoir des croyances à propos de l'Au-delà. Leur refuser de s'être interrogés sur cette perspective, au même titre que nous le faisons, reviendrait à oublier notre appartenance commune à une même espèce. Mais comment combler les lacunes de l'archéologie ? Après Cosmogonies , qui avait démontré la robustesse des méthodes phylomythologiques pour reconstituer les mythes du passé en retraçant la généalogie de ceux qui nous sont connus, Julien d'Huy s'attelle ici à répondre à des questions fondamentales : à quoi les premiers Homo sapiens attribuaient-ils leur finitude ? Dans leur esprit, l'humanité était-elle mortelle dès l'origine et, sinon, comment l'est-elle devenue ? Sous quelles formes se figuraient-ils leur dernière demeure et le chemin qui y menait ? Croyaient-ils en une vie après la mort et à la possibilité de revenir de l'autre monde ? Comment envisageaient-ils les relations entre les morts et les vivants ?

C'est dans ce voyage fascinant, véritable archéologie de la psyché, que nous entraîne l'auteur, en montrant la force avec laquelle certains mythes hérités de nos lointains devanciers continuent de nous influencer dans l'art, la philosophie, la religion, voire la science, sécrétant toujours un puissant imaginaire autour de notre questionnement ultime.

L’objet de cet ouvrage est un peu plus précis que le précédent de Julien d’Huy : là où le premier présentait la méthodologie phylomythologique et les enseignements qu’elle permettait de tirer sur l’histoire humaine à travers quelques mythes généraux, celui-ci s’intéresse plus précisément à l’origine et à l’évolution des mythes sur la mort et les rapports de l’humanité à celle-ci.

Julien d’Huy s’appuie sur la mythologie mondiale, applique sa démarche scientifique inspirée de la phylogénétique appliquée aux mythes, et confronte ses résultats aux connaissances obtenues par d’autres chercheurs par d’autres sources, comme l’archéologie ou l’art rupestre.

Comme le premier ouvrage, celui-ci est passionnant du début à la fin : le déroulé de la démarche phylomythologique plait à mon côté scientifique ; l’utilisation de la mythologie mondiale comme corpus de sources plait à mon côté littéraire ; les enseignements que l’auteur en tire sur le passé lointain de l’humanité répond à mon goût pour l’histoire ; quand au thème des rapports entre l’être humain et la mort, il s’agit d’une interrogation probablement universelle qui ne me laisse pas non plus indifférent.

Je suis donc ravi d’avoir poursuivi ma découverte des recherches de Julien d’Huy avec ce second ouvrage, parfait pour acheter mon année 2024 de lecture.

Pour finir, je vous propose quelques citations extraites du livre :

Sur le rôle consolateur des mythes sur la mort :

Les mythes d'origine de la mort ont d'abord en commun de réduire le scandale de la mort à la répétition d'un acte premier, à un déjà-vu mythologique. Chacun serait voué à répéter un jour cet événement lointain mais toujours recommencé. Ils jouent ainsi un rôle d'apaisement.

Sur les liens entre mythes, fatalité et liberté :

Penser le mythe comme mythe nous libère. Il n'est pas sûr, naturellement, que l'effet suive la cause, et que l'Homme libre un instant ne recherche pas au plus vite une nouvelle prison, une nouvelle cage où s'enfermer. La perte d'un mythe ne conduit souvent qu'à en engendrer un autre. Cependant, par l'aperçu qui lui aura été donné des possibilités de son esprit, ce bref instant de liberté pourra lui offrir un avant-goût de liberté. Longtemps après que le premier effet s'en sera estompé, il continuera à susciter une réflexion sourde, qui fait que plus jamais, peut-être, l'Homme n'adhérera tout entier aux récits qu'on lui offre.

Sur la singularité de l’humanité, en tout cas telle qu’elle se perçoit :

Le proto-mythe du Soleil chassé nous conduit à faire un dernier constat. Le fait qu'il intercale une action humaine dans la succession d'événements qui expliquent la mort et la renaissance de l'astre suggère que les premiers Sapiens ne se voyaient pas comme de simples spectateurs de la disparition et de la renaissance du Soleil, mais comme des actants, chassant et ressuscitant l'étoile. Ce point est à rapprocher de la coutume sans doute aussi ancienne qui consistait à produire le plus de bruit possible lors d'une éclipse pour faire fuir la créature qui s'attaquait à l'astre.

Ces éléments laissent supposer que les premiers humains anatomiquement modernes, par leur action, s'imaginaient faire en sorte que le monde ne puisse pas être autrement qu'il n'est. Si on peut y voir un besoin de s'intégrer à un tout, de se relier de corps et d'esprit à l'ordre naturel des choses, ne faut-il pas y lire aussi une envie d'être essentiel à la bonne marche de l'univers ? Se rêvant d'importance, l'humain se serait vu comme un réparateur du monde, garant de sa stabilité. L'humain ne se serait pas imaginé ne pas être ou le monde être sans lui.

En participant ainsi au fonctionnement et aux origines du monde, il paraît prendre conscience très tôt de son irréductibilité parmi les vivants. Cette singularité se retrouve dans sa conception du temps. Les premiers Sapiens concevaient non seulement l'écoulement du temps, de la naissance à la mort, mais aussi sa répétition. Associée à la conscience des contraintes (la mort est inévitable) et des transformations (le corps de l'être vivant se décompose à sa mort mais continue à exister sous une autre forme), Homo sapiens franchit dès l'Afrique une étape fondamentale vers sa modernité. Cependant, à la différence du Soleil et des animaux (héliophores), l'Homme, à sa mort, pense partir sans retour physique. Dès cette période se serait donc établie une certaine conscience de l'altérité, un « nous » humain s'inscrivant contre le « nous » animal. L'être humain devait se sentir non comme étranger à la communauté des autres êtres vivants, mais comme différent, appartenant à une communauté se construisant à la fois avec et contre les morts.

Sur la trace laissée par chacun dans l’histoire à travers les mythes :

La mythologie comparée montre ainsi que nombre de nos mythes, de nos récits, de nos images, émergent des profondeurs de notre histoire, bien au-delà de la simple parenthèse de nos vies individuelles. En reprenant et en reproduisant les histoires du passé, nous devenons nos propres précurseurs et laissons une trace ineffaçable car nécessaire dans l'histoire de l'humanité. Chacun ajoute sa pierre à la demeure commune, récoltant d'hier les mythes de demain pour construire, chacun à sa façon, la partie de la maison qui lui a été donnée. Cette répétition nous unit également, puisque les fondations de cette maison sont communes, érigées à partir d'un même foyer : l'Afrique. De cette époque demeure quelque chose dont tout humain est le dépositaire.

Sur le même thème, mais exprimé de façon plus succincte :

Vivre, c'est donc accepter de mourir, sachant que notre participation à la transmission de la grande parole des humains suffit à nous rendre immortel. Il s'agit dès lors moins de s'ériger contre le destin de l'Homme que d'y prendre une part singulière.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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Cosmogonies, sous-titré La préhistoire des mythes, est un ouvrage de l’historien et mythologue Julien d’Huy, publié octobre 2020 chez La Découverte. J’ai eu envie de le lire après l’avoir vu cité à plusieurs reprises dans Avant nous le Déluge !, l’humanité et ses mythes de Jean-Loïc Le Quellec, qui a d’ailleurs été le directeur de thèse de Julien d’Huy.

Comment expliquer les ressemblances troublantes que l'on observe entre des mythes dont l'aire de répartition fait parfois le tour de la Terre, alors même que les populations auprès desquelles ils ont été recueillis, distantes dans l'espace ou dans le temps, n'ont pu se côtoyer ? Se pourrait-il que cet air de famille relève non de convergences fortuites mais de véritables liens de parenté unissant des récits transmis de génération en génération au fil du peuplement humain de la planète ? En empruntant aux biologistes de l'évolution leurs méthodes statistiques de classification des espèces du vivant sous forme d'arbres phylogénétiques, cet ouvrage novateur entreprend d'étayer de manière rigoureuse une intuition fondatrice de la mythologie comparée.

De Polyphème à la Femme-Oiseau et à la Ménagère mystérieuse, en passant par le Plongeon cosmogonique, le Soleil volé et les mythes de matriarchie primitive, Julien d'Huy montre comment des récits apparemment disjoints les uns des autres se ramifient autour de troncs communs, qui s'enracinent dans les profondeurs de la Préhistoire. Suivant leur évolution, ponctuée d'altérations, d'emprunts et d'oublis, au gré des pérégrinations de notre espèce, il retrace la généalogie de grandes familles de mythes qui se sont propagées depuis des temps immémoriaux.

Mais la reconstitution de ce processus de transmission d'un patrimoine mythologique ouvre une perspective plus vertigineuse encore : reconstruire les proto-récits dont les versions documentées sont issues ; autrement dit, faire à nouveau résonner les premiers mythes de l'humanité et appréhender la vision à travers laquelle nos lointains ancêtres donnaient sens au monde qui était le leur.

La vulgarisation scientifique est, comme la cuisine, un art délicat où l'équilibre est roi : trop légère, trop simple, elle laisse le lecteur sur sa faim ; trop lourde, trop riche, elle peut lui faire frôler l'indigestion. Si le livre de Jean-Loïc Le Quellec était une bonne introduction à la mythologie comparée mais m’avait laissé un goût d’inachevé, cet ouvrage de Julien d’Huy est plus complet et plus complexe. J’ai parfois eu du mal à comprendre dans le détail tous les arguments techniques, mais il me semble avoir tout de même réussi à suivre le raisonnement d’ensemble, que l’auteur prend d’ailleurs la peine de synthétiser régulièrement dans les conclusions intermédiaires et les transitions entre les chapitres. L’équilibre a parfois été précaire pour le novice que je suis, mais je suis allé jusqu’au bout et surtout, j’ai été captivé du début à la fin, ce qui est plutôt un très bon signe.

Julien d’Huy est un scientifique rigoureux, cela se sent en le lisant. Tout au long du livre, il explique clairement la méthodologie de ses recherches, présente ses résultats, propose des explications et des scénarios qu’il confronte aux résultats obtenus par d’autres chercheurs avec d’autres méthodologies. Le livre retrace à la fois le fil de ses recherches et de ses « découvertes ».

La démarche scientifique est passionnante à suivre et le résultat est vertigineux. Les scénarios présentés par l’auteur forment une ébauche de récit, une proto-histoire du peuplement humain à travers la diffusion et l’évolution de ses mythes, ainsi que des pistes sur l’organisation des sociétés d’alors.

Si certains pensent que les recherches en sciences humaines et sociales sont des pertes de temps, je pense au contraire qu’elles sont essentielles et que ce livre en est la parfaite illustration. D’une certaine façon, cela m’a fait la même impression que lors de ma lecture passionnée et passionnante de The Dawn of Everything, a New History of Humanity de David Graeber et David Wengrow, un livre qui m’avait émerveillé et beaucoup marqué.

J’ai envie de vous laisser avec quelques extraits de ce livre :

Une première citation, sur l’impact des mythes sur la psychologie :

Prendre conscience de l'enchaînement des causes conduisant à répéter sans cesse les mêmes histoires, loin de produire l'effet d'une fatalité insupportable, permettrait plutôt de la déjouer. S'il nous est impossible de nous débarrasser des mythes, nous gardons le pouvoir de les apprivoiser, de les domestiquer, voire d'en refuser certains. Et en cela nous sommes libres de notre chemin, capables de nous écarter d'un discours mythologique qui pourtant nous a façonné.

Et surtout ce passage, que je trouve sublime, sur les grandes migrations qui ont donné lieu au peuplement de la planète depuis le berceau africain de l’humanité :

Au-delà des raisons de ce départ au gré des variations climatiques et des opportunités cynégétiques, c'est la témérité de l'expédition qui interroge. Ce que nous apprend l'étude de la mythologie à cet égard, c'est qu'Homo sapiens est une espèce affabulatrice qui croit dans ses mensonges. Cette confiance de l'Homme en ses récits fondamentaux, sa capacité à se fier à eux et à s'abandonner à la parole de ceux qui les lui ont transmis pourraient avoir permis à nos ancêtres d'aller toujours plus loin, d'explorer de nouveaux milieux, d'expérimenter des matières premières et des sources d'alimentation inusitées, voire de faire face à des prédateurs insoupçonnés ou à d'autres hominidés... Si le monde est hérissé de frontières, physiques – montagnes, fleuves, éco-zones, etc. – et symboliques, l'imaginaire les ignore. Les mythes peuvent ainsi escorter les hommes, comme autant de compagnons rassurants. Ils sont capables d'expliquer le monde et de réduire le chaos et les contradictions à l'unité, préparant les voyageurs à affronter le nouveau en le subsumant sous le connu. Les premiers Hommes ayant quitté l'Afrique devaient avoir suffisamment foi dans la puissance explicative de leurs mythes pour braver les dangers et s'aventurer au-delà des sentiers battus. La peur de l'inconnu était pour eux moins forte que le pouvoir, dont ils investissaient les mythes, de l'expliquer.

Et pour finir, cet extrait de la conclusion :

Or prendre conscience que la version du mythe que je connais n'est pas la seule, que d'autres coexistent avec elle comme manifestations d'un même type, revient à appréhender l'identité dans la différence. La personne que j'ai en face de moi, qui connaît une autre version de mon mythe, apparaît dans sa singularité propre, comme détentrice de sa propre lecture d'un même récit. Mon mythe n'est plus seulement cet objet que je pensais propre à ma culture, ce bien de famille transmis de génération en génération, mais un patrimoine en partage, compris et restitué par l'autre à travers sa vision du monde. Il est autant à lui qu'à moi. Son récit a la même structure que le mien, ce qui implique que, au-delà de différences de forme, nos points de vue ne sont pas incommensurables. Les deux versions du mythe forment un tout, me poussant à inclure l'autre dans mon humanité, et ce même si nous ne sommes pas d'accord entre nous. [...]

Par ce processus, il y a passage de la confrontation au dialogue. Dans le dialogue, « les interlocuteurs s’accordent sur ce dont ils parlent pour pouvoir être en désaccord sur ce qu’ils disent ». Parlant du même mythe, nous savons que nous parlons de la même chose, mais différemment. [...]

Dans ces conditions, aucune version actuelle d’un mythe ne peut plus se prévaloir d’une quelconque antériorité chronologique. La multiplicité des versions et leurs filiations multiples nous dépassent, ouvrant la voie à une communication réciproque et généralisée. Que le partage d’anciennes croyances ait précédé l’établissement des différences contemporaines m’oblige à quitter la position autocentrique qui était la mienne pour considérer le discours de l’autre comme apparenté au mien. Tout en faisant droit à la diversité des cultures, l’approche phylogénétique des mythes contribue à reconnaître au discours d’autrui une appartenance à un fonds commun de l’humanité, perdurant au-delà des façons particulières, propres à chaque tradition, d’exprimer le monde.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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A King in Waiting est le troisième tome des Immortal Investigations, la saga d’urban fantasy de l’auteur australien Michael Cronk, également connu pour sa chaîne YouTube The Book Guy. J’ai contribué au financement participatif des trois premiers tomes et j’achève ma lecture des trois tomes, que j’ai dévorés l’un après l’autre en quelques jours.

In the middle of the night, a hooded stranger arrives on Jason’s doorstep begging for help, with a terrifying assassin close on their heels. The stranger is a witch named Leslie Toussaint, and they need Jason’s detective skills to find out who sent the assassin.

Leslie is a historian, and they may have stumbled upon a great secret of the past. A secret that someone wants to keep hidden at all costs.

Silvana sees this as an opportunity. A historian could help her finally uncover her own past, and she will take any risk to discover the truth. But will she like what she finds?

Jason must track down who is behind this deadly assassin. More importantly, he must uncover the secret that someone is trying to hide, lest history repeat itself. But Jason has no idea how much this secret could change the world forever.

Ce roman est à la fois le plus ambitieux et le plus réussi des trois premiers de la saga. Le récit est palpitant, les enjeux sont immenses. L’univers imaginé par l’auteur s’étend, son histoire et sa mythologie s’approfondit, ce n’est d’ailleurs pas un hasard si l’un des personnages de ce roman est historien·ne. Puisque je parle des personnages, ils sont toujours aussi attachants, sinon plus (mention spéciale pour Jason, Silvana et Freddie, mais aussi pour Edward). Tous les ingrédients sont donc réunis pour un excellent roman, et j’ai été captivé du début à la fin.

Je ne l’avais pas encore fait en parlant des deux premiers romans, mais il y a plusieurs points que je me dois d’évoquer car ils concernant les trois tomes de la saga. D’abord, Michael Cronk propose un ensemble de personnages dont la diversité est le maître mot : diversité d’origines sociales et ethniques, diversité de genre, diversité d’orientation sexuelle, le tout avec une fluidité (de genre, haha) remarquable, loin des stéréotypes que l’on peut voir parfois. Ensuite, l’auteur parle parfaitement de santé mentale et de handicap. Ces sujets de représentation, Michael Cronk en parle toujours très justement sur sa chaîne YouTube, et j’apprécie beaucoup de voir qu’il le fait également parfaitement dans ses romans.

Ce roman est clairement mon préféré parmi les trois premiers tomes de la saga. Tous les arcs narratifs ne sont pas encore bouclés, mais c’est un très bel aboutissement pour l’histoire débutée dans le premier tome. Les révélations finales laissent en tout cas espérer de grandes choses pour la suite. Je dois dire que j’ai assez hâte de lire les prochains romans du cycle, même si je sais que l’auteur va devoir prendre un peu plus son temps après une année 2024 épuisante pour nous proposer en une seule fois les trois premiers romans.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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The Mortal Knight est le deuxième tome des Immortal Investigations, la saga d’urban fantasy de l’auteur australien Michael Cronk, également connu pour sa chaîne YouTube The Book Guy. J’ai contribué au financement participatif des trois premiers tomes et je poursuis ma lecture après le premier roman qui m’avait beaucoup plu.

Jason Turner has taken one small step into the world of Immortals. Now, he’s about to take a giant leap.

Silvana’s family has been invited to a gala for the rich and powerful Immortal Houses that rule from the shadows. Silvana knows this is her chance to make allies and save her dying House from fading into ruin. But the Immortal world is a ruthless, cutthroat society that preys on the naïve and gullible. Her family is weak, and the vampires smell blood in the water.

Things take a turn for the worse when the gala comes under attack and a wealthy wizard is killed. Who or what is responsible? And why? Jason puts himself on the case and begins his search for the murderer.

But Jason is only a mortal knight, bumping shoulders with wizards, vampires, and other folk of the Immortal Imperium. He must solve this crime quickly and in secret, before he draws the wrong kind of attention. His investigation risks bringing down the wrath of the High Kings themselves…

L’avantage du deuxième tome d’une saga, c’est que l’on connait déjà l’univers et les personnages principaux. Cela permet de plonger plus vite dans le récit, mais cela autorise également l’auteur à enrichir et développer son univers. Michael Cronk le fait parfaitement dans ce roman : il s’appuie sur les fondations qu’il a bâties dans le premier tome pour ajouter de la complexité, approfondir ses intrigues, enrichir les forces en présence, et faire monter les enjeux.

Cela fonctionne parfaitement et j’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce roman. L’enquête est plus intéressante que la précédente. Les personnages sont toujours aussi attachants, peut-être même plus car on les découvre de plus en plus et les liens tissés entre eux s’affirment. Je dois d’ailleurs mentionner la relation entre Jason et Nicholas, qui est l’un des points très forts du roman.

Tous les mystères ne sont pas résolus, certaines questions nouvelles sont apparues, et tout cela donne très envie de découvrir la suite dans le troisième tome : A King in Waiting, que je vais attaquer dans la foulée.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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J’ai découvert Michael Cronk grâce à sa chaîne YouTube The Book Guy, où il propose des critiques de romans de façon bienveillante et objective. Son but n’est pas de dire du bien ou du mal des livres dont il parle, mais avant tout de décrire à quoi on peut s’attendre en lisant ces livres. Si je devais résumer son approche, je dirais qu’il cherche à trouver le bon livre pour le bon lecteur, ou le bon lecteur pour le bon livre. J’apprécie aussi son érudition sur la littérature et la narratologie, ainsi que sa façon de mettre en avant les aspects sociaux et sociétaux des livres qu’il évoque dans ses vidéos.

Tout cela pour dire que j’avais un a priori plutôt favorable quand il a annoncé le lancement en financement participatif de ses trois premiers romans auto-publiés qui constituent le début de ce qui pourrait être une future grande saga d’urban fantasy : Immortal Investigations. J’ai participé au financement participatif et j’ai reçu en début de semaine la version numérique des trois romans. Je me suis aussitôt plongé dans le premier : The Immortal Investigation.

Jason Turner is a rookie cop who dreams of becoming a detective. His roommate asks for a police escort on his date with a supposed 'vampire'. While acting as a sceptical chaperone, Jason meets Silvana, a mysterious woman who is looking for a new husband, and possibly a new source of blood.

In this quiet seaside town of Plymouth, England, secrets are everywhere. A cult of vigilante monster hunters is hosting public events and gaining popularity. People claiming to be immortals are roaming the town at night. And there’s Silvana, who’s eager to get closer to Jason and tell him fantastic stories about secret societies and immortal magic.

But Jason has his own dark secrets. And he can’t help being suspicious of Silvana and her strange family, even as his attraction to her grows. The closer he gets, the more his fellow officers begin to suspect his involvement with that bizarre murder with a bloodless corpse…

An urban fantasy with magic, monsters, and mystery, The Immortal Investigations is the first in a series by Michael Cronk, known for his Youtube channel The Book Guy. With thrilling action, romance, and multiple shocking twists, this book is sure to be loved by both new and old readers of the fantasy genre.

Difficile de parler de ce roman sans évoquer un classique de l’urban fantasy : les aventures d’Harry Dresden, d’autant que j’ai lus les dix-sept romans de Jim Butcher l’été dernier et qu’ils sont encore frais dans ma mémoire. Je dois dire que Michael Cronk n’a pas à rougir de la comparaison.

En tout cas, ce roman est très divertissant, le mystère et le suspense fonctionnent bien, les personnages principaux sont attachants, les scènes d’action sont plaisantes à lire, et l’univers suffisamment original et mystérieux pour avoir envie d’en savoir plus dans les prochains romans. L’auteur nous accompagne d’ailleurs dans son univers avec son personnage principal, Jason Turner, avec qui nous découvrons progressivement l’envers du décor. C’est classique, mais cela fonctionne bien.

Si je devais émettre un bémol, ce serait sur la multitude de personnages secondaires, pas toujours évidents à distinguer et qui ne jouent pas tous un grand rôle dans le récit. Je pense notamment aux collègues de Jason, peut-être un peu trop nombreux pour qu’on les distingue vraiment. J’aurais peut-être réduit un peu le casting, au moins pour ce premier roman. Les prochains romans permettront peut-être de découvrir plus en détail tous ces personnages, mais pour l’instant certains m’ont semblé interchangeables.

Quoi qu’il en soit, j’ai pris beaucoup de plaisir à découvrir l’univers imaginé par Michael Cronk dans ce roman, et je vais plonger sans attendre dans le deuxième roman : The Mortel Knight.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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Je suis faible, et la technologie moderne ne m’aide pas : il suffit parfois que j’entende parler d’un livre intéressant pour qu’il rejoigne presque immédiatement ma « pile à lire ».

C’est ce que s’est passé avec ce livre Avant nous le Déluge !, sous-titré L’humanité et ses mythes, dont j’ai entendu parler son auteur, l’anthropologue Jean-Loïc Le Quellec, dans l’émission Les idées larges sur Arte Radio. Le sujet m’a tout de suite passionné et l’approche du livre me semblait intéressante :

Une déambulation dans les mythes qui accompagnent l’humanité. Comment ils émergent, se partagent, circulent. Un émerveillement de récits, dans le monde entier, depuis nos origines.

Depuis le début de l’humanité, nous inventons des récits, les mythes, pour mieux comprendre notre monde. Jean-Loïc Le Quellec les collecte, les étudie, les compare, à toute époque même la plus reculée, dans tout peuple, dans autant de langues que possible.

On explique l’universalité des mythes aujourd’hui par une transmission au fil des migrations. Cette diffusion n’est pas systématique, elle se fait ou pas, ou de différentes manières, dessinant ainsi les évolutions des peuples en une fabuleuse cartographie historique du monde.

Mythes cosmogniques ou héroïques, animaux mythiques (jusqu’à notre pangolin)… L’auteur nous emmène dans une histoire infinie, poétique, puissante, pour réfléchir au rôle des mythes dans notre humanité.

Ce tour du monde nous invite à nous détacher de notre perception européano-centrée, à revoir nos certitudes (mythiques elles aussi ?). Une lecture jouissive et éblouissante.

Si je devais présenter cet ouvrage, je dirais qu’il s’agit d’une bonne introduction à la mythologie comparée, c’est-à-dire la discipline qui cherche à étudier et comparer les mythes de plusieurs peuples, dans le temps et dans l’espace.

C’est une bonne introduction car l’auteur fait preuve de pédagogie pour présenter et expliquer les concepts de base qu’il mobilise, les illustrer par des exemples parlants, le tout dans un style qui m’a semblé accessible à toutes et tous.

Par contre, je suis un peu resté sur ma faim pour deux raisons.

D’abord, j’ai trouvé que la structure du livre était un peu chaotique : si l’auteur propose un cheminement de chapitres en chapitres, sa logique n’est pas toujours évidente, et j’ai trouvé qu’il faisait parfois des digressions qui peuvent être intéressantes mais dont je me suis parfois demandé ce qu’elles faisaient à ce moment du propos.

Ensuite, j’ai regretté que l’ouvrage reste un peu superficiel sur la mythologie comparée proprement dite. Les premiers chapitres, qui définissent la notion de mythe, l’histoire et l’actualité de leur étude par les mythologues sont bien sûr nécessaires, mais prennent finalement beaucoup de place dans un ouvrage qui ne fait que 260 pages. De fait, cela laisse moins d’espace pour entrer ensuite dans le détail de la mythologie comparée proprement dite. Il y a bien sûr des exemples et des leçons à en tirer, mais personnellement j’aurais beaucoup aimé en savoir plus.

Je le redis donc : ce livre est à mes yeux une bonne introduction à la mythologie comparée, à lire pour une première approche de la discipline si le sujet vous intéresse.

Pour en savoir plus après cette initiation, je vais pour ma part me pencher prochainement vers un ouvrage qui s’annonce plus complet et plus complexe : Cosmogonies, La préhistoire des mythes de l’historien et mythologue Julien d’Huy, que Jean-Loïc Le Quellec a justement préfacé et qu’il cite dans ce livre.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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Le monde nazi : 1919-1945 est un ouvrage co-écrit par les historiens Johann Chapoutot, Christian Ingrao et Nicolas Patin et publié en septembre 2024 chez Tallandier.

Le 30 janvier 1933, Adolf Hitler est nommé chancelier du Reich. Les nazis avaient développé, depuis 1919 et le traumatisme de la Grande Guerre, une vision du monde qui n’avait d’original que sa cohérence raciste et son élan utopique. Ils surent exploiter le contexte d’une crise majeure, celle de 1929, pour subjuguer les consciences et accéder au pouvoir.

Le pouvoir leur fut donné, avec une inconséquence sidérante, par les élites en place qui pensaient que Hitler ne tiendrait que quelques semaines et que ses partisans seraient « domestiqués ». Or les nazis prirent immédiatement le contrôle du pays avant de le conduire à la destruction, réduisant finalement le continent tout entier à un immense charnier. Le monde intérieur nazi, cet imaginaire politique pétri de haine, d’angoisse et d’utopie, avait donné naissance en l’espace de douze années à un monde infernal ; un monde qui impliquait la mort de dizaines de millions de personnes, dont la majorité des Juifs du continent.

Dans cet ouvrage, trois historiens du nazisme proposent un récit inédit, une histoire totale du national-socialisme, de sa naissance en 1919 à son effondrement en 1945. En se fondant sur les renouvellements de l’historiographie internationale de ces trente dernières années ainsi que sur une pratique constante des sources, Johann Chapoutot, Christian Ingrao et Nicolas Patin analysent le nazisme de l’intérieur : le système de croyances, les émotions fanatiques et la culture militante des années 1920 ; la nature du « Troisième Reich » comme « dictature de la participation » fondée sur un consentement massif de la population ; enfin, la « guerre génocide » de 1939-1945, apocalypse raciale qui réalise les potentialités de l’eschatologie nazie.

En s'appuyant sur l'historiographie des 30 dernières années et bien sûr sur leur propre expertise, puisqu’ils sont tous trois spécialistes du nazisme, les co-auteurs proposent une histoire totale du national-socialisme, de sa naissance en 1919 à son effondrement en 1945.

L’ouvrage se compose de trois grandes parties, dont je vous présente brièvement le sommaire :

Partie 1 : La conquête du pouvoir

  1. Une « vision du monde » à l’histoire longue
  2. De la Grande Guerre à la défaite : une radicalisation de l’Allemagne ? (1914-1920)
  3. Un parti politique sans importance (1920-1928)
  4. La fin de la démocratie et le basculement dans la dictature (1928-1933)

Partie 2 : Anatomie d’une dictature

  1. La « mise au pas » et l’émergence de l’État nazi (1934-1939)
  2. Terreur et résistances (1933-1939)
  3. Une « dictature de la participation » ? La société allemande (1933-1939)
  4. La politique extérieure nazie (1933-1939)

Partie 3 : Une guerre génocide

  1. Combattre (1939-1944)
  2. L’Europe des abîmes (automne 1939 – été 1944)
  3. Détruire
  4. L’effondrement (1944-1945)

C’est un gros pavé qui peut sembler intimidant au premier abord : 640 pages de texte proprement dit, et plus de deux-cent pages d’annexes. Pourtant, très vite, j’ai trouvé la lecture plus aisée que je le craignais. Je dirais même que cela se lit presque comme un roman. C’est absolument passionnant, c’est précis et accessible, nuancé et tranchant.

Les auteurs développent un récit clair, une argumentation convaincante, et mobilisent des exemples, des sources et des points de vue variés sans noyer le lecteur sous les détails. Ils réussissent à la fois à décrire le spécificité du nazisme et à le resituer dans le temps long, y compris après son effondrement en 1945.

A mes yeux ce livre constitue à ce jour la meilleure synthèse sur le nazisme, de ses origines à son effondrement.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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Le capital, c’est nous, sous-titré Manifeste pour une justice sociale et écologique, est un essai politique du biologiste, syndicaliste et député LFI Hendrik Davi. Il a été publié en novembre 2023 aux éditions Hors d’atteinte.

Ce livre, sur lequel Hendrik Davi a travaillé pendant quinze ans, propose à la fois une vision d'ensemble de la situation dans laquelle nous sommes et une vision des futurs émancipateurs possibles vers lesquels nous pourrions tendre. Avec un point de vue original forgé par une formation de biologiste, un solide bagage philosophique, une expérience de syndicalisme militant et une pratique politique en tant que député, Hendrik Davi part des contradictions du système actuel pour dessiner un horizon écosocialiste lucide et désirable. Passant de la théorie à la pratique tout en prenant acte que nous sommes dans un moment de passation, il aborde enfin une stratégie concrète et amorce l'écriture d'une histoire plus apaisée et plus collective.

Le livre se compose de quatre parties :

1. Pourquoi des révolutions sont-elles nécessaires ? Hendrik Davi dresse tout d’abord un constat des contradictions, des impasses et des crises contemporaines du capitalisme.

2. L’horizon écologiste, socialiste et démocratique L’auteur propose ensuite un contre-projet à opposer au modèle capitaliste néolibéral, autour de 4 valeurs : « principe Gaia » (respect des écosystèmes), égalité, solidarité, et émancipation.

3. Stratégies révolutionnaires Le livre prend ensuite un tournant un peu trop théorique à mes yeux, en parlant de théorie de la révolution, de dialectique, d’idéologies et des institutions qui les propagent et les maintiennent.

4. Que faire en France au XXIe siècle ? Enfin, l’auteur revient à des considérations plus concrètes : il s’agit cette fois d’imaginer comment appliquer les principes stratégiques décrits dans la partie précédente pour mettre en œuvre le projet décrit au cours de la deuxième partie dans le cadre de la France d’aujourd’hui. Après le constat, le projet, et la stratégie, vient le temps des tactiques révolutionnaires.

Hormis la troisième partie qui m’a semblé trop théorique, l’ouvrage est plutôt accessible. L’auteur semble lucide, il ne cache pas les difficultés qui attendent une gauche radicale qui souhaiterait promouvoir et appliquer un projet écosocialiste, mais le projet est enthousiasmant.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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L’imaginaire au fil des pages, sous-titré Lectures de science-fiction et fantasy chez les jeunes adultes, est un ouvrage d’Elodie Hommel, tiré de sa thèse de doctorat en sociologie consacré aux pratiques de lecture de littératures de l’imaginaire de jeunes adultes. Il a été publié en juin 2024 aux Presses Universitaires de Rennes.

Depuis le début des années 2000, les titres de fantasy se multiplient dans les collections et éditions traditionnellement dédiées à la science-fiction. Face à ce succès croissant, la catégorie éditoriale englobante de « littératures de l’imaginaire » est apparue et s’est progressivement imposée. À rebours des discours alarmistes sur la désaffection de la lecture, ces récits sont plébiscités par les jeunes générations. L’ouvrage entend comprendre les raisons de ce succès, à travers l’analyse des réceptions de ces littératures et de leurs spécificités : recherche conjuguée d’évasion et de réalisme, inscription dans des communautés d’intérêt, effets cruciaux de l’âge et de la génération. Loin des stéréotypes qui associent ces productions à des lectures « faciles » et dépourvues de dignité littéraire, cette recherche en sociologie met en évidence la richesse et la complexité des lectures de science-fiction et de fantasy. À travers le cas des littératures de l’imaginaire, elle éclaire plus largement les pratiques de lecture à l’ère numérique, les évolutions des pratiques lectorales à l’entrée dans l’âge adulte et les phénomènes de distinction à l’oeuvre au sein de genres dont la légitimité n’est pas assurée.

Le livre fait moins de 300 pages, le texte est tout à fait accessible à des novices en sociologie, comme moi. Il se compose de six chapitres :

  1. Les “littératures de l'imaginaire” : un ensemble éditorial foisonnant

  2. Raisons de lire de l'imaginaire : conjuguer évasion et réalisme

  3. La matérialité du livre dans l'expérience de lecture

  4. Carrières de lecteurs et lectrices en littératures de l'imaginaire

  5. Comment genre et milieu social façonnent l'expérience de lecture des littératures de l'imaginaire

  6. La culture de l'imaginaire : des lectures inscrites dans des communautés d'intérêt

  7. Postures de lecteurs et lectrices face à la légitimité ambiguë des littératures de l'imaginaire

J'ai trouvé cette étude plutôt intéressante, en particulier quand l'autrice aborde la notion de “carrières de lecteurs et lectrices” ainsi que les stratégies de distinction (coucou Pierre Bourdieu) que l'on retrouve parmi les lecteurs et lectrices de littératures de l'imaginaire, par rapport aux non-lecteurs ou aux lecteurs d'autres genres littéraires, mais aussi entre lecteurs et lectrices de littératures de l'imaginaire.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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